jeudi 29 septembre 2011

Entre boulimie et misogynie?:

La bataille du trône d’Apollinaire AGBAZAHOU

Apollinaire AGBAZAHOU, professeur certifié de Lettres, Conseiller Pédagogique puis Inspecteur de l’Enseignement Secondaire, s’est surtout fait un nom dans le monde enseignant avec l’encadrement à Abomey (ville du centre Bénin) de troupes théâtrales scolaires. Son goût pour ce travail s’est au fil des années transformé en une véritable passion pour l’art dramatique. En effet, deux pièces théâtrales sont déjà mises à la connaissance du public béninois et international. Le gong a bégayé, montée et jouée dans le cadre du Festival du Danxomê 2003 et du FITHEB 2004, est un véritable plaidoyer pour la revalorisation des valeurs kamites. La bataille du trône, première pièce écrite en 1997, même si elle ne s’éloigne pas de cette thématique est beaucoup plus ancrée sur la gestion des peuples. Le réalisme de l’auteur et le fil conducteur de l’action séduisent et méritent qu’on y prête attention.

1- RESUME DE LA PIECE

La bataille du trône met en scène les populations d’un Empire appelé Nimbé. La misère ambiante sous laquelle croupissent les jeunes, qui contrastent pourtant avec la vie rutilante des proches du pouvoir et autres courtisans ont amené un groupe d’individus à peaufiner une révolte. Homessin, Ziguidi et Evêdo sont à la tête du mouvement. Mais alors qu’ils discutaient des raisons qui motivent leur prochain coup et ses plans pour le réussir, l’Empereur envoie ses messagers les cueillir. Homessin seul réussit à s’enfuir. Ziguidi et Evêdo sont amenés au palais et l’Empereur s’apprêtait déjà à les exécuter comme beaucoup d’autres pris avant eux quand le prince héritier intervient et tente de l’en dissuader. Mais les arguments avancés ne convainquent guère l’Empereur qui, jugeant son règne éternel, trouve stupide l’intervention de son fils et ordonne même à ses gardes de le fusiller. Le prince eut l’habileté de sortir rapidement son arme, réussit à libérer Ziguidi et Evêdo avant de prendre ses jambes à son cou. Les trois se retrouvent ainsi contraints à l’exil comme Homessin qui y était déjà.

Le prince, après quelques heures en forêt, aperçoit un génie qui lui lit l’avenir et lui promet la fin de ses souffrances. Progressivement, Evêdo, Ziguidi, le prince et Homessin se retrouvent pour organiser la rébellion. Ils envahissent le palais avec les jeunes formés par Homessin et l’Empereur fut déposé. Mais alors que le pouvoir leur est désormais acquis après une lutte âpre et hardie, une bataille contre toute attente s’engage entre eux sur les postes à occuper par chacun d’eux. Homessin y laisse sa peau et Evêdo a dû user de ses charmes afin de dissuader Ziguidi de tirer sur elle et sur le prince. Ziguidi s’est contenté d’un poste de « troisième homme » du pouvoir.

Ce résumé fait apparaître évidemment comme le dit le titre de la pièce une véritable bataille pour le trône impériale. C’est que, tous les personnages autant qu’ils sont, n’ont qu’une seule obsession : le pouvoir.

2- L’OBSESSION DU POUVOIR

La pièce théâtrale la bataille du trône est une tragi-comédie qui suit les règles classiques. En effet, écrite en trois actes de six scènes pour les deux premières et sept pour le troisième, elle respecte les lois de l’unité du temps et d’action.

Elle est écrite avec un langage profondément inspiré de la tradition béninoise et comporte beaucoup de didascalies avec la particularité des états d’âme de personnages qui sont mis avant les répliques. Ceci témoigne surtout de la maîtrise que l’auteur a de l’art de la mise en scène.

Il n’y a qu’un seul monologue, celui du prologue au début de la pièce. Le reste n’est que dialogue entre les personnages. L’importance de chacun des personnages dans l’intrigue peut se déterminer à travers le tableau suivant qui fait apparaître leurs interventions dans la pièce:

Personnages

Scènes ACTE I ACTE II ACTE III T

1 2 3 4 5 6 1 2 3 4 5 6 1 2 3 4 5 6 7

Le crieur 1

Le fou 9

Homessin 5

Ziguidi 6

Evêdo 9

Les deux conseillers 2

L’empereur 5

Les gardes

Le prince 10

Le génie 2

LA BATAILLE DU TRONE, VUE GLOBALE DE L’ŒUVRE

Ce schéma à double entrée personnages/scènes fait apparaître nettement les personnages centraux de la pièce. En effet hormis le fou qui n’a pas un rôle déterminant dans l’évolution de l’intrigue, le prince et Evêdo s’offrent les premiers rôles. Ils sont suivis de Ziguidi, de Homessin et de l’empereur. Le reste n’a fait que de la configuration pour permettre à l’action d’aller à terme.

A propos de cette action, elle se déroule dans le seul but de montrer que le pouvoir est une fin en soi et qu’il faut tout faire pour l’obtenir ou s’y maintenir advienne que pourra. Tous les personnages de la pièce ont en effet une obsession du pouvoir, non pour le bonheur du peuple mais pour leur propre intérêt.

L’Empereur

L’empereur est présenté, à l’instar de plusieurs chefs d’Etat africains comme un dictateur sadique que la souffrance du peuple n’émeut guère. Seul son trône lui importe. Et puisqu’un guru lui aurait promis un règne éternel, il se croit doté des pouvoirs de vie et de mort sur tous ses sujets qu’il peut égorger comme des poulets. Le peuple a faim, il réclame le minimum pour assurer les cinq besoins fondamentaux, mais il n’y arrive pas. Pire, il n’a même pas la liberté de se soulager la conscience en s’exprimant. Il n’est pourtant pas paresseux. Beaucoup d’entre eux ont réussi à avoir de grands diplômes dans de grandes universités internationales. Ceci est caractéristique de la qualité professionnelle dont il est doté. Mais l’empereur, du moins son conseil, ne fait rien pour l’insertion de ces diplômés. Au contraire, tout est fait pour les éloigner afin qu’ils ne puissent pas un jour partager avec eux les richesses de l’Empire. Cette minorité et l’Empereur lui-même s’accrochent donc au pouvoir pour se servir aux dépens du peuple. C’est Ziguidi qui décrit mieux la situation :

« Ziguidi

furieux

Mais les anciens… ont tout mis en œuvre… afin de mieux accumuler des fortunes illicites…au lieu de créer des emplois, ils investissent tous dans le béton. Les villas poussent comme des champignons. » Acte I Scène 2

C’est donc l’injustice, l’inégale répartition des richesses, la trahison de l’empereur qui a osé ordonner l’assassinat de son fils pour sauvegarder son pouvoir, qui motivent les jeunes dans cette révolte.

Cette révolte légitime, donc justifiée serait cependant très appréciée et applaudie si les ambitions qui les y portèrent eux aussi, n’étaient les mêmes que ceux contre qui ils l’avaient fait. En effet, les jeunes révoltés, autant qu’ils sont avaient envie tout simplement d’avoir les mêmes avantages et honneurs que leurs prédécesseurs.

Le prince

« Nous nous jetons sur le pouvoir pour le pouvoir. L’esclave ne s’affranchit plus pour libérer de l’esclavage mais pour devenir maître d’esclaves. »

Ces phrases de l’écrivain congolais Henri Lopès, extraites de son ouvrage Sans tam-tam, traduisent mieux l’attitude des jeunes révoltés et notamment du prince.

Le prince s’est révélé pire que son père car, au moins lui se servait des gardes pour éliminer ses adversaires. Mais le prince y est allé de mains fortes avec Homessin et ferait de même pour le fou si on l’avait laissé faire. Pire, il est un véritable hypocrite qui n’a révélé réellement ce qu’il est qu’après avoir pris le pouvoir. Son discours d’équité, de justice pour tous, de fils révolté contre la tyrannie de son père s’est transformé en un discours dictatorial allant jusqu’à la réclamation d’une noblesse de sang.

Ensuite, il est ingrat, car même si on peut trouver qu’il a sauvé la vie à Evêdo et Ziguidi, il n’était pas informé de la préparation du putsch. Il devrait donc les remercier pour lui avoir offert le pouvoir sur un plateau d’or. Mais non seulement il n’a pas reconnu le mérite des véritables putschistes, il a encore trouvé des arguments fallacieux pour le défendre. A moins que, étant le personnage principal comme l’a révélé le tableau plus haut, il serait tacitement à la base de tout. C’est peut-être lui qui aurait fourni les informations nécessaires aux jeunes révoltés afin qu’ils se soulèvent contre le pouvoir. Seul objectif : précipiter la mort ou le départ de son père afin de lui prendre son trône. L’histoire des royaumes, notamment celui d’Abomey révèle un roi célèbre dans ce coup bas. Le schéma actanciel de Greimas ci-dessous peut confirmer cette analyse.

Destinateur objet Destinateur

Le prince le pouvoir le prince

le peuple

Adjuvants sujet opposants

Ziguidi Le prince L’empereur

Evêdo Homessin

les conseillers les gardes

le génie

Homessin

Schéma actanciel de Greimas montrant l’action du prince dans la bataille du trône d’Apollinaire AGBAZAHOU

Le prince serait ainsi l’instigateur principal de tout. C’est lui que l’auteur aurait dû tuer à la place de Homessin pour ces discours hypocrites.

Mais la mort de Homessin relève du réalisme. L’histoire a montré que les cerveaux des coups d’Etat, s’ils ne prennent pas le pouvoir eux-mêmes sont toujours éliminés. L’Histoire du Dahomey est très sensible pour qu’on puisse encore raviver les mémoires en l’évoquant.

Homessin

Cette mort, Homessin est allé la chercher, d’abord en remettant naïvement le trône au prince que rien n’indiquait destiné au pouvoir dans ces circonstances. Sa naïveté l’a amené à prendre le prince pour une femmelette qu’il pouvait vaincre facilement. Mais c’est surtout sa soif d’être à la place de ceux qu’il a combattus qui l’a conduit au trépas. Car s’il se contente de la place de simple conseiller, c’est qu’il y trouve des intérêts énormes. C’est déjà largement mieux que celle du diplômé sans emploi en galère, incapable de procréer. Qui sait si la phase trois de l’opération ne constituait pas à reprendre sournoisement le trône au prince.

Ziguidi

Ziguidi apparaît le moins ambitieux car il a été le premier à évoquer la nécessité de remettre les jeunes au travail et ainsi de leur assurer le quotidien qu’ils réclamaient, mais en réalité, il n’est pas mieux que les autres. C’est lui qui a engagé cette discussion de phallocrate avec Evêdo. L’histoire à travers les livres saints (Bible- Coran-Tora), les législations et même la science, démontre que c’est parce que les hommes ne veulent pas partager le pouvoir avec les femmes qu’ils trouvent des raisons pour justifier la faiblesse de leur sexe. (Simone de Beauvoir, le deuxième sexe).

Dans cette révolte, Evêdo a plus de mérite que Ziguidi et Homessin. C’est elle qui a mené l’assaut final vers le palais. Ce courage qu’elle a eu en braquant l’arme sur l’empereur avec des menaces, n’est pas celle qu’on connaît d’ordinaire aux femmes traditionnelles d’Afrique. La place de ‘’deuxième homme’’ qu’elle réclamait ne serait donc pas usurpée. C’est Ziguidi qui, se prévalant de ses droits masculins a voulu prendre une place qui ne lui revenait pas. Mais puisqu’en politique, c’est la fin qui justifie les moyens (Machiavel), il faut user de tout pour avoir les meilleurs positionnements. Ziguidi n’a même pas de scrupules. Légèrement amadoué par Evêdo qui l’appela par un diminutif Zin, il a oublié la mémoire de son compagnon de lutte et accepté le poste de responsables du conseil des sages. C’est à croire que le poste politique juteux est la seule raison pour laquelle il faille faire une lutte.

Les deux conseillers

Les deux conseillers sont atypiques de ces politiciens qui ne suivent que la direction du vent dominant. Sans conviction ils sont prêts à tout, ramper, changer de veste, dans le seul et unique but de demeurer au pouvoir avec les avantages matériels qui en découlent. Ayant pactisé avec l’Empereur pour le meilleur et pour le pire, ils n’ont eu aucune honte à le quitter pour rejoindre les jeunes qui ont désormais les faveurs du peuple.

Evêdo

Evêdo qui fait partie de ces jeunes a également l’obsession du pouvoir. En effet si la bataille a commencé, c’est parce qu’elle a voulu instaurer une parité au sein du conseil étatique. Alors que Ziguidi ne demandait que ce qu’il fallait pour remettre le peuple en confiance, elle trouve qu’il est plus urgent d’amener sa cousine Yonnouvou dans ce conseil, en excluant un homme pour l’équilibre sexiste. C’est elle qui en réalité est à la base de ce bouillonnement qui a conduit les hommes à s’entredéchirer.

Cependant, à ce niveau de l’analyse, il est indispensable de se demander si comme Sembene Ousmane, Apollinaire AGBAZAHOU joue au féministe ou si comme Kangni Alem, il est en train de montrer le danger que représente la femme au pouvoir.

3- EXALTATION FEMINISTE OU LIMITES DU POUVOIR FEMININ

Le rôle attribué à Evêdo par l’auteur est d’une grandeur énorme. Contrairement à la tradition, elle se retrouve dans une assemblée d’hommes en train de décider de la gestion de la cité. Mieux, elle fait partie du noyau central et tout porte à croire que c’est elle qui dirige ce noyau. Elle est forte de caractère et ne courbe l’échine devant rien ni personne. Cette discussion houleuse entre elle et Ziguidi à propos du sexe faible en est une illustration probante. En effet, c’est elle qui a gagné la bataille en traitant le sexe masculin de faible parce qu’il se fatigue plus vite que celui féminin. Elle a résisté également physiquement face à Ziguidi qui voulait lui arracher le trône de force.

Tout porte à croire qu’à l’instar de Sembene Ousmane à travers Penda et Ramatoulaye ; Camara Laye à travers sa mère ; Francis Bebey à travers Binta Diallo et Joseph Ki Zerbo, Apollinaire AGBAZAHOU trouve que la situation de la femme n’est guère si regrettable que certains écrivains voudraient nous le faire croire. Il ne peut d’ailleurs en être autrement si l’on considère la bravoure dont ont fait montre les amazones dans Kondo le Requin de Jean Pliya.

Mais c’est justement cette force de caractère d’Evêdo, pareille à celle des amazones qui inquiète. Les amazones, sont des soldats formés pour exercer la pression voire la violence. Mais qu’Evêdo qui aspire gérer des hommes, étale toute cette énergie allant jusqu’à brusquer l’autorité suprême, donne matière à réflexion et suscite interrogations.

Evêdo pourrait-elle gérer sans dictature ? Si les hommes montrent leurs limites dans la gestion de la cité, les femmes doivent-elles être automatiquement appelées à la rescousse ?

Kangni Alem, dramaturge togolais, à travers sa pièce théâtrale la Saga des rois a démontré toute la calamité que pouvait être une femme au pouvoir. En effet, après plusieurs coups d’Etat révolutionnaires, les populations du Sorgolo, toujours insatisfaites ont décidé de se confier à la gent féminine. Mais qu’elle n’a pas été leur stupeur lorsqu’elles constatent que c’était une dictature pire que sous les hommes. Cette séquence est assez éloquente.

« Le fou : Majesté, votre enfant a fini de parler.

LA REINE : Méprisante. S’il était mon enfant, j’en aurais fait cadeau aux commerçants….yorouba ! Mes sœurs, voici l’infamie que répand … ce bâtard, cet excrément inachevé, cette chauve souris aux pattes sous développées ! Quelle solution, autre que la mort, proposez-vous à son encontre ?

LES COURTISANES : La mort ! » La saga des rois, « Encore une nouvelle journée », in Kangni Alem, Théâtre Volume 1, p 98.

Cet extrait présente des femmes pourtant génitrices, très sadiques, réclamant la mort d’un enfant qui a commis le péché mignon de dire qu’il s’est vu en songe, devenir roi. Le pouvoir est si juteux, que même des femmes en arrivent à oublier la douleur de l’enfantement pour se donner à des actes d’une cruauté énorme.

Apollinaire Agbazahou n’est pas loin d cette conception du pouvoir féminin. En effet, le fou seul a vite su déceler ce que sera réellement Evêdo au pouvoir.

« Le fou

railleur

La femme aux commandes est plus autoritaire que l’homme. Ambitieuse, elles le sont aussi. » La bataille du trône, Acte II scène 6

La fougue féministe qu’on pourrait lire dans cette pièce, n’est en réalité que du réalisme dans la vision des choses.

Ce réalisme, se note également au niveau de l’onomastique de la pièce.

4- UNE ONOMASTIQUE TRADITIONALISTE

A l’instar de plusieurs dramaturges béninois, Apollinaire AGBAZAHOU s’est inscrit dans une démarche nominative assez traditionaliste. Tous les noms sont inspirés du répertoire fon et empruntent la démarche des prétendants à des postes politiques qui se donnent des surnoms forts.

Ziguidi est le premier nom fort qui frappe à l’œil. Il signifie « le bruit ». Donc celui qui le porte voudrait que tous ses adversaires sachent qu’il est capable d’exercer une force énorme. Mais cette appellation pourrait aussi provenir du proverbe « ce sont les tonneaux vides qui font du bruit ». Car malgré toute cette force dont il se dit être doté, il n’est pas intelligent pour éviter la ruse d’Evêdo et du prince. Comme il l’a dit lui-même, c’est que tout simplement le bruit lui donne un certain courage :

« le tapage me soulage. Je me sens quelqu’un quand je fais du bruit » Acte I scène 2

Homessin voudra signifier la colère. Celui qui porte ce nom fort avertit aussi ses adversaires de toutes ses capacités réactionnelles. En effet, Homessin s’est présenté à plusieurs reprises en justicier, capable d’effacer par un coup de force l’affront subi et, comme Zoro, de faire régner la justice. La colère est un sentiment qui précède la réaction et c’est normal que ce soit lui qui dirige la rébellion. Sa mort peut cependant être un signe de l’auteur qui voudrait que tout se négocie et que les hommes puissent se comprendre à travers l’instauration de dialogue permanent.

Evêdo, la seule femme du groupe a un nom qui pourrait se traduire par « c’est ce qu’il croyait ». Ceci se traduit littérairement par l’ennemi se trompe sur mes capacités. C’est assez fort comme nom. En effet, Apollinaire AGBAZAHOU voudrait montrer à travers ce personnage une autre image de la femme traditionnelle. Elle a été à la hauteur de la tâche à elle confiée et nulle n’y croyait vraiment.

Le prince aurait pu s’appeler Vidaho. Mais l’auteur s’est certainement racheté dans sa seconde pièce le gong a bégayé.

L’Empire également a un nom qui peut donner à interprétation. En effet, Nimbé est inéluctablement une anagramme du mot Bénin. Ceci voudrait-il dire que l’auteur s’est inspiré de l’histoire politique de son pays, notamment celle qui l’a conduit à l’avènement du renouveau démocratique en 1990 ? Greimas, dans ces théories analytiques a estimé qu’une œuvre littéraire a un contenu posé et un contenu inversé. Le contenu inversé de la bataille du trône nous amène à cette conclusion qui prend cette pièce pour une satire socio politique du Bénin à la chute de la dictature révolutionnaire menée par le régime Kérékou I.

En résumé, Apollinaire AGBAZAHOU a usé d’un talent littéraire énorme pour peindre le quotidien de son peuple et participer ainsi à la construction de sa nation car le rôle du théâtre est de distraire en corrigeant (castigat ridendo mores). Seul malaise à la fin de la pièce, la contradiction entre la nouvelle marche des éclopés et le chant d’espoir qu’ils ont entonné. En effet, si les infirmes reviennent sur scène à la fin alors qu’ils l’étaient au début, cela suppose que la situation est restée la même malgré les bouleversements qu’il y a eu et que le peuple n’a pas eu la satisfaction qu’il souhaitait. C’est le même constat de l’éternel recommencement énoncé par Edgar Okiki Zinsou dans le remaniement et qui se révèle être aussi d’actualité. Ce chant d’espoir détint donc avec la logique de cette réapparition.

Agence Sud Presse /Anicet Fyoton MEGNIGBETO

Professeur de Lettres Modernes

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