Un alléchant avant-goût
d’un grandiose spectacle en perspective
En début de
soirée, le samedi 11 mars 2017, dans l’enceinte du Centre Culturel Artistik
Africa d’Ousmane Alédji à Agla-Cotonou, l’Association des Professeurs du
Français du Bénin, a été impliquée dans la tenue d’un événement culturel de
grande importance : La lecture spectacle du Chroniqueur du PR, une pièce de théâtre publiée en 2016 aux
Editions Plumes Soleil par l’écrivain béninois, Daté Atavito BARNABE-AKAYI, par
ailleurs Professeur de français.
Mise
en scène par Hermas Gbaguidi avec les distributions des comédiens Carlos Zannou
et Elysée Maforikan, cette lecture qui a fait salle comble, avec des spectateurs
en plus grand nombre à l’extérieur qu’à l’intérieur, par manque de places, a
tenu l’assistance en haleine, résultat du professionnalisme dont le duo de
comédiens sus nommé a fait preuve. En effet, cette pièce qui porte sur une
actualité politique brûlante et terriblement allusive, met en scène deux confrères
journalistes. Autour de verres qui se vident au fil de la discussion, et attendant un repas qui n’est finalement
jamais servi, les deux vont s’évertuer, dans un premier tableau, à proposer une satire acerbe de l’univers
politique d’un pays, assimilé à une jungle où chaque acteur avait son correspondant.
Dans une
optique patente de zoomorphisme, cette jungle a vu un roi Lion qui a l’habitude
de bondir, se faire écraser et remplacer par un Eléphant. Un géant éléphant qui
en réalité n’a d’atout que sa masse physique impressionnante. Il manque d’intelligence
tactique et aligne des erreurs politiques, sociales et économiques au point
qu’il est aisé de comparer la nation qu’il dirige à une véritable pachydermique
dictature. Et la fourmi, assimilable à un opérateur économique qui a été accusé
à l’œil nu, et sans preuve scientifique d’un trafic illicite, se révèle le seul
animal capable de jouer son rôle dans la jungle : rester l’ennemi juré de
l’éléphant, la trompe de ce dernier s’accommodant difficilement de sa présence.
Seul le Dauphin du Lion a été ménagé. Un Dauphin contre lequel, les vieux
démons du champ politique se sont réveillés pour faire foirer sa campagne. Eléphant, Lion,
Fourmi et Dauphin constituent ainsi cette métaphore zoologique à travers
laquelle, Daté Atavito BARNABE-AKAYI va excellemment présenter un tableau
pathétique d’un monde politique pourri.
C’est le
second tableau, où ces mêmes confrères évoluent avec un dévoilement progressif
du visage entretemps masqué, qui va confirmer la dictature de l’éléphant. En
effet, kidnappé et torturé dans un endroit secret, le chroniqueur va découvrir,
à sa grande stupéfaction et déception,
qu’il n’est en réalité que la victime presque innocente de son ancien
confrère devenu Président de la République. Un président pour qui, il a battu
campagne en tant que Directeur. Mais, au nom de la vérité, de la justice et de
l’honneur, le chroniqueur va comprendre le monstre terrible qui est en cet
homme qui se présente comme un agneau devant le peuple, mais qui n’est qu’un
véritable psychopathe. En effet, le chroniqueur réalise ahuri, que sa femme,
qu’il partageait par ailleurs avec son ami et confrère président, et ses trois
filles avaient déjà été tuées par cet homme, dont le degré démoniaque est sans
limites. Et lorsque l’on fait le lien entre ce dénouement tragique et
l’exposition de la pièce (où le confrère assimilait le journaliste à un terroriste
et où un apprenant ne rêvait que de terrorisme comme carrière envisagée), on
comprend aisément que ce Confrère président, a annoncé les couleurs dès le
départ : le journalisme, un métier à supprimer parce qu’offrant le pouvoir
à ces professionnels de détruire des hommes politiques agneaux, sains et
innocents ? La pièce pose la problématique fondamentale de savoir
qui, en démocratie, est responsable du plein exercice des libertés : les
dirigeants ? le peuple ? les journalistes ? , etc.
Le public,
séduit par ce texte plaisant, qui rapporte des réalités auxquelles il n’est pas
véritablement étranger va voir se passer l’heure de ‘’Lecture spectacle’’ aussi
vite qu’un éclair. L’aboutissement de la mise en scène du spectacle proprement
dit de cette pièce de Daté Atavito est pour bientôt, à en croire Hermas
Gbaguidi.
Rappelons que Le chroniqueur du PR, est la quatrième
pièce de théâtre publiée par Daté Atavito BARNABE-AKAYI après Les Confessions du PR, Amour en infraction et Quand Dieu a faim en 2011. Les confessions du PR avait déjà suscité
autant d’intérêt politique, puisqu’à l’époque, Togolais, Béninois, Camerounais…
s’étaient mirés goulûment à travers le président dictateur et pervers qui se
confessait au faux prêtre. Les quatre pièces restent dans le nouveau théâtre béninois
avec une écriture sans fioritures, exempte donc de didascalies, de découpage en
scène, en tableau, en Acte… et limitant surtout le nombre de personnages : deux, la plupart du temps
avec cette capacité de leur faire porter plusieurs masques et par ricochet,
plusieurs casquettes.
Anicet Fyoton MEGNIGBETO
SG/ APFB